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Vivement demain

Aurore Boréale

24 Mars 2017 , Rédigé par Marcel Dehem

Aurore Boréale

 

 

 

Une si belle vue...

 

 

C'était vraiment une belle acquisition cet appartement sur les pentes du Faron. Ils avaient un peu hésité. Le prix était un peu au dessus de leur budget mais ils ne le regrettaient pas. Quelle vue !

Depuis la terrasse de trente mètres-carrés exposée plein sud, ils avaient effectivement une vue magnifique sur la rade et la vieille ville.

La cafetière électrique lança son appel strident ce n'était pas mentionné sur l'emballage ce signal sonore indiquant que le café était prêt. Chaque matin ça lui vrillait désagréablement les oreilles ― tous ces petites signaux sonores émis par les deux ordinateurs portables, la tablette des enfants, les deux smartphones, la cafetière électrique, le cuit-vapeur, le micro-ondes, la voiture lui tapaient parfois sur les nerfs. Sans parler des sonneries qui rythmaient implacablement chacune des heures de cours dans son collège de la banlieue-ouest.

Il faisait un peu frais en cette fin octobre mais ils ne se lassaient pas de prendre leur petit-déjeuner sur la terrasse.

La voix chantante de Louise résonna dans l'appartement.

Margot, Robin, il est l'heure mes chéris. Il faut se lever !

Des enfants adorables, une femme charmante, sexy qui attirait le regard des hommes, un appartement clair, spacieux, confortable et un garage individuel fermé pour l' Audi A4 dont ils ne se servaient pas pour aller travailler. L'arrêt de bus se trouvait à deux-cent mètres de leur immeuble dans une rue perpendiculaire.

Julien ! Tu pourras t'occuper des enfants ce matin, j'ai une réunion à huit heures.

Pas de problème Louise, j'ai cours à neuf-heures aujourd'hui.

Le soleil-levant inondait déjà la terrasse lorsque Margot déboula, les cheveux en bataille pour prendre son petit-déjeuner. Margot, douze ans, blonde comme son père, se pencha pour l'embrasser alors qu'il était en train de mordre dans un toast beurré recouvert d'une épaisse couche de confiture de... Confiture de quoi ? se demanda-t-il. C'est jaune, c'est sucré...Il retourna machinalement le pot pour lire l'étiquette...abricot ! Ah, oui, vaguement pensa-t-il.

Attention Margot, tu as failli renverser ma tasse de café. Tu as bien dormi ma chérie ?

Bof ! Répondit-elle. J'ai eu du mal à m'endormir. C'est à cause de cette interro de maths...

C'est pas plutôt à cause de Facebook ? dit-il, ne loupant aucune occasion de rappeler à ses enfants que passer trop de temps devant un écran pouvait être dommageable pour la santé, les yeux, la concentration à l'école. Surtout la concentration à l'école, enfin au collège maintenant. Comme ça passait vite. Leur bébé était maintenant une vraie jeune fille. Louise lui avait d'ailleurs confié, en lui demandant d'être discret, que Margot était réglée. Réglée ! Il avait sursauté quand elle lui avait dit ça. Cette expression, réglée, quelque part le dérangeait. C'était ridicule, il s'en rendait compte mais le terme résonnait comme Affaire conclue ! Topez-là. Rien n'était réglé pas plus avec Margot qu'avec Robin qui émergea à son tour sur la terrasse en faisant une grimace à sa sœur et en disant ça caille ici.

Respire Robin, regarde ce panorama ! Il va faire beau.

Regarde ce panorama, répéta Margot en singeant son père.

Robin lui lança une bourrade qui eut pour effet de répandre sur la nappe la cuillerée de muesli qu'elle s'apprêtait à enfourner.

Louise arriva à point nommé pour faire cesser la chamaillerie matinale entre les deux ados. Pantalon noir ajusté, chemisier blanc,escarpin noir, rouge à lèvre carmin. Julien était fier de sa femme. Une vraie beauté. Elle se servit sans s'asseoir une tasse de café dans lequel elle ajouta un nuage de lait, attrapa un toast qu'elle grignota du bout des lèvres avant de dire :

Je file, soyez sage, Margot tu penseras à mettre ton linge sale dans la corbeille, ça traîne au pied de ton lit ! La remarque fit ricaner Robin dont la tête émergeait à peine de son bol de céréales chocolatées avant qu'il n'émette un grognement désapprobateur lorsque Louise lui dit qu'il pourrait changer de chaussettes et de caleçon.

Ça sent le fauve dans ta chambre, ajouta Louise en lui ébouriffant la tignasse de lion qui lui servait de coiffure depuis quelques années.

Tu pues, a dit maman, ajouta Margot.

Ta gueule ! Grommela Robin, la bouche pleine.

Papa, j'ai un exposé à faire sur le soleil et les planètes, tu m'aideras ?

C'est pour quand ?

Bof, vendredi je crois.

Tu aurais peut-être pu en parler avant, non !

On a encore deux jours...

On regardera ce soir. Tu n'as pas une heure de perm où tu pourrais commencer ta recherche au CDI ?

Humm !

Alors, vas-y, s'il te plaît. Au lieu de bavarder en permanence. La CPE m'a dit que tu passais ton temps à papoter avec ta copine.

Amélie ?

Oui, Amélie. Bon, on s'active un peu les enfants. N'oubliez pas de faire ce qu'a demandé votre mère. Le linge sale dans le panier.

Oui papa, s'exclamèrent-ils en cœur en sortant de table en se pinçant.

 

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